« Si donc l'action involontaire est celle qui résulte de la violence ou de l'ignorance, ce qui est volontaire semble être ce dont le principe se trouve dans l'agent qui connaît toutes les circonstances particulières de l'action. »
Aristote, Éthique à Nicomaque, IVe siècle av. J.-C.
Sénèque : accepter l’ordre des choses
Plus loin dans cette même lettre il écrira la célèbre formule : « Le destin guide celui qui l’accepte, il entraîne ceux qui le refusent. » (Fata volentem ducunt, nolentem trahunt)
« C’est la constitution des choses : la changer nous est impossible ; ce que nous pouvons, c’est de nous élever à cette hauteur d’âme, si digne de la vertu, qui souffre avec courage les coups du hasard et veut ce que veut la nature. »
Sénèque, Lettre à Lucilius, 65
Spinoza : la liberté définie par la nécessité
« J'appelle libre, quant à moi, une chose qui est et agit par la seule nécessité de sa nature ; contrainte, celle qui est déterminée par une autre à exister et à agir d'une certaine façon déterminée. [...] Concevez maintenant, si vous voulez bien, que la pierre, tandis qu'elle continue de se mouvoir, pense et sache qu'elle fait effort, autant qu'elle peut, pour se mouvoir. Cette pierre assurément, puisqu'elle a conscience de son effort seulement et qu'elle n'est en aucune façon indifférente, croira qu'elle est très libre et qu'elle ne persévère dans son mouvement que parce qu'elle le veut. »
Spinoza, Lettre 58 à Schuller, XVIIe siècle
Kant : peut-on sauver la liberté malgré le déterminisme ?
« Si les phénomènes sont des choses en soi, on n’a pas à sauver la liberté [...] Si, au contraire, les phénomènes ne sont pour nous que ce qu’ils sont en fait, à savoir non des choses en soi mais de simples représentations qui s’enchaînent selon des lois empiriques, il faut alors qu’ils aient eux-mêmes des fondements qui ne soient pas des phénomènes » « [Une telle cause intelligible] est donc, ainsi que sa causalité, en dehors de la série ; ses effets, au contraire, se trouvent dans la série des conditions empiriques. L’effet peut donc être considéré, par rapport à sa cause intelligible, comme libre et en même temps, par rapport aux phénomènes, comme une conséquence de ces phénomènes, suivant la nécessité de la nature. »
Kant, Critique de la raison pure, 1781
Leibniz : l’harmonie préétablie et la question du mal
« Je ne saurais non plus approuver l’opinion de quelques modernes qui soutiennent hardiment, que ce que Dieu fait n’est pas dans la dernière perfection, et qu’il aurait pu agir bien mieux. Car il me semble que les suites de ce sentiment sont tout à fait contraires à la gloire de Dieu : de la même façon qu’un moindre mal est relativement bon, un moindre bien est relativement mauvais. Et c’est agir imparfaitement, que d’agir avec moins de perfection qu’on n’aurait pu. C’est trouver à redire à un ouvrage d’un architecte que de montrer qu’il le pouvait faire meilleur. »
Leibniz, Discours de métaphysique, 1686
Saint Augustin : le libre-arbitre est un don de Dieu
« La volonté libre sans laquelle personne ne peut bien vivre, tu dois reconnaître et qu’elle est un bien, et qu’elle est un don de Dieu, et qu’il faut condamner ceux qui mésusent de ce bien plutôt que de dire de celui qui l’a donné qu’il n’aurait pas dû le donner. »
Saint Augustin, Du libre arbitre, IVe-Ve siècle
Descartes : l’infinité de la volonté et les différents usages de la liberté
« Il n’y a que la seule volonté, que j’expérimente en moi être si grande, que je ne conçois point l’idée d’aucune autre plus ample et plus étendue : en sorte que c’est elle principalement qui me fait connaître que je porte l’image et la ressemblance de Dieu. [...] Et certes la grâce divine et la connaissance naturelle, bien loin de diminuer ma liberté, l’augmentent plutôt, et la fortifient. De façon que cette indifférence que je sens, lorsque je ne suis point emporté vers un côté plutôt que vers un autre par le poids d’aucune raison, est le plus bas degré de la liberté et fait plutôt paraître un défaut dans la connaissance, qu’une perfection dans la volonté. »
Descartes, Méditations métaphysiques, 1641
Sartre : le paradoxe de la liberté
« Ainsi commençons nous à entrevoir le paradoxe de la liberté : il n’y a de liberté qu’en situation et il n’y a de situation que par la liberté. La réalité humaine rencontre partout des résistances et des obstacles qu’elle n’a pas créés ; mais ces résistances et ces obstacles n’ont de sens que dans et par le libre choix que la réalité humaine est. »
Sartre, L’Être et le néant, 1943
Constant : la liberté individuelle est le fondement de la légitimité politique
« La reconnaissance abstraite de la souveraineté du peuple n’augmente en rien la somme de liberté des individus ; et si l’on attribue à cette souveraineté une latitude qu’elle ne doit pas avoir, la liberté peut être perdue malgré ce principe, ou même par ce principe. »