1Étude 1 : la population active française, reflet des bouleversements économiques et sociaux depuis 1914
A) La croissance de la population active
croissance lente du début du XXe siècle (20 millions) aux années 1970 (22 millions en 1975) ; s’explique par :
le déficit des naissances dû aux deux guerres mondiales
la crise économique des années 1930
la population active en 2015 = 28 millions d’actifs ; s’explique par :
l’arrivée des baby-boomers sur le marché du travail
l’immigration
l’essor du salariat féminin
chômage modéré de 1914 à 1975 (2 % de la population active), puis crise économique et croissance ralentie
explosion du chômage (env. 10 % aujourd’hui) qui devient structurel et frappe surtout les jeunes, les femmes, les plus de 54 ans, les travailleurs immigrés et les ouvriers les moins qualifiés
précarisation du travail et accroissement de la pauvreté (8,6 millions de personnes aujourd’hui) et de l’exclusion (1985 : création des Restos du Cœur par Coluche)
hausse du salariat dans le secteur privé (industrialisation) et la fonction publique (développement de l’État) et recul des indépendants (paysans, commerçants, professions libérales, etc.)
B) Recul de la paysannerie, développement puis recul de la classe ouvrière
recul de l’emploi agricole au cours du XXe siècle, qui s’est accéléré avec la mise en place de la Politique Agricole Commune (PAC, 1962), passant ainsi de 42 % en 1914 à moins de 3 % en 2015
essor puis recul du monde ouvrier
essor de 1914 (30 % de la population active) aux années 1970 (37,5 % en 1975) grâce :
au développement de la grande industrie et de l’organisation scientifique du travail (OST : taylorisme, fordisme)
après 1945 à l’essor des ouvriers spécialisés (OS, sans qualification) et au recours à l’immigration
formation d’une classe ouvrière, avec ses syndicats (CGT surtout), ses partis (grands poids du Parti communiste), sa culture, ses territoires (Nord de la France, banlieues des grandes villes), ses manifestations (grandes grèves du Front Populaire en 1936, de 1947 et 1968)
recul du secteur secondaire depuis 1975 (20 % aujourd’hui), à cause de la crise (fermetures d’usines, robotisation/informatisation) et d’une certaine désindustrialisation dans le cadre de la mondialisation (délocalisations)
recul (cheminots, métallurgistes) ou disparition (mineurs) de certains métiers
éclatement du monde ouvrier entre OS non qualifiés, ouvriers qualifiés/techniciens et contremaîtres membres des professions intermédiaires, etc.
C) Tertiarisation de l’économie
lente augmentation de 1914 (moins de 30 % de la population active) au début des années 1950 (34 %), liée à l’urbanisation et l’industrialisation du pays
nouveaux métiers dans le tertiaire : employés (bureaux, commerces, etc.)
essor des professions libérales et des commerçants
développement de la fonction publique
forte croissance depuis les années 1950
77 % des actifs aujourd’hui ; le tertiaire crée plus de 90 % des emplois : société post-industrielle
explosion des emplois de bureau et de services (commerces, services de proximité et à la personne), avec une forte féminisation (75 % des employés) et une baisse des qualifications
essor des cadres et professions intermédiaires (« cols blancs ») et supérieures (près de 40 % des catégories socioprofessionnelles) grâce à l’éducation de masse : essor des classes moyennes
développement de la fonction publique avec l’extension du rôle de l’État républicain (éducation, santé) et la création d’un État-providence après 1945
2Étude 2 : la République et la question ouvrière : le Front Populaire
A) Un monde ouvrier marginalisé avant le Front Populaire
IIIe République s’est installée
en s’enracinant dans les campagnes
en s’appuyant sur les classes moyennes
crainte du modèle révolutionnaire illustré par la Commune (1871) puis la révolution bolchévique en Russie (1917) : répression des manifestations ouvrières (Fourmies, 1891 ; grèves de 1906 réprimées par Clemenceau)
les ouvriers ne se reconnaissent pas dans une République « bourgeoise » ; organisation du monde ouvrier surtout autour du socialisme
syndicats autorisés en 1884, Internationale socialiste en 1889, Confédération Générale du Travail (anarchiste) en 1895, Charte d’Amiens en 1906
organisation des socialistes en parti politique : SFIO (Jaurès) en 1905, division au Congrès de Tours (1920) entre socialistes réformistes (SFIO, Léon Blum) et communistes révolutionnaires (PCF)
question ouvrière surgit fin XIXe : débat entre les radicaux (partisans d’une action de l’État contre les inégalités) et les socialistes (partisans d’une République sociale : Jaurès)
amélioration lente de la condition ouvrière depuis la fin du XIXe siècle :
interdiction du travail des enfants (1874) et des femmes la nuit (1892)
repos hebdomadaire (1907)
retraites ouvrières (1910)
journée de 8 heures (1919 : revendication principales des grèves d’avant-guerre)
assurances sociales (1928) et allocations familiales (1932)
situation qui s’aggrave depuis la crise de 1929
montée du chômage
impuissance des gouvernements à résoudre la crise
montée des ligues d’extrême-droite menaçant la République (émeutes du 6 février 1934, auxquelles participent des anciens combattants et des communistes)
partis et syndicats de gauche forment un Front Populaire (programme de gouvernement commun) et gagnent les législatives de mai 1936
B) La mutation du monde ouvrier sous le Front Populaire
mai-juin 1936, grande vague de grèves avec occupations d’usines pour fêter la victoire du Front Populaire et le soutenir ; accords Matignon (juin 1936)
droit et liberté syndicale dans toutes les entreprises
délégués ouvriers
augmentation des salaires de 7 à 15 %
juin 1936-juin 1937 : gouvernement Blum (SFIO + radicaux) avec soutien du PCF (Maurice Thorez), lois sociales
40 heures de travail hebdomadaire
conventions collectives
2 semaines de congés payés
renforcement de l’intégration des ouvriers dans la République et de l’adhésion à ses valeurs, malgré l’échec du Front Populaire
affirmation de l’identité d’une classe ouvrière dominée par les ouvriers de la grande industrie tayloriste
essor de la syndicalisation : la CGT devient un parti de masse (4 millions d’adhérents) et un acteur essentiel du dialogue social
essor parallèle du PCF comme parti de la classe ouvrière
3Étude 3 : l’immigration et la société française au XXe siècle
A) Une immigration européenne jusqu’à la Seconde Guerre mondiale
la France est un des premiers pays d’immigration en 1900-1930 par manque de main d’œuvre à cause d’une faible natalité puis de la Première Guerre mondiale : 2,7 millions d’étrangers en 1931 (contre 1 million en 1911) = 7 % de la population. Législation très favorable (droit du sol en 1889, loi sur la nationalité en 1927, asile politique)
immigration européenne de populations pauvres (Italie, Belgique, Pologne, Espagne surtout) et de réfugiés politiques (Allemagne, Espagne), installée dans les régions industrielles (Nord, Lorraine, région parisienne) et le Sud (ouvriers agricoles, industries), mal payée mais qui finit par s’intégrer
1931 : crise économique, montée de la xénophobie ; l’État limite les entrées et organise des expulsions et les licenciements frappent d’abord les immigrés
Vichy mène une politique xénophobe d’exclusion (emplois interdits, pertes de la nationalité française, antisémitisme d’État) ; 1,5 million d’étrangers en 1946
B) Une immigration massive pendant les Trente Glorieuses
gros besoins en main d’œuvre à cause de la reconstruction et de la croissance économique : forte immigration prise en charge par l’État (Office national d’immigration, 1945) et les entreprises privées ; 3,4 millions d’étrangers en 1975 (6,5 % de la population)
origines renouvelées : d’abord des Européens (Portugais, Espagnols, Italiens), puis des Maghrébins et des travailleurs d’Afrique noire à partir des années 1960 (décolonisation), majoritairement dans l’industrie (OS, manœuvres), le bâtiment, mais aussi les services et l’agriculture dans le Sud
conditions de travail et de vie difficiles : salaires bas, travaux pénibles, logements dans des foyers (immigration maghrébine souvent d’hommes seuls) ou des bidonvilles ; les populations maghrébines sont moins bien intégrées
C) Une immigration remise en question depuis 1975
crise et chômage : l’État met un frein à l’immigration (encouragement au retour au pays) sauf pour le regroupement familial. Depuis les années 1980, alternenance de politiques d’assouplissement (régularisation, immigration choisie) et de fermeté (reconduite aux frontières, durcissement des conditions d’obtention des visas et de l’asile politique)
internationalisation des flux d’immigration (Europe de l’Est, Asie) et développement de l’immigration clandestine à la faveur de la quasi-fermeture des frontières européennes (200 à 400 000 immigrés clandestins en France aujourd’hui ?) ; essor des politiques de lutte contre l’immigration clandestine
immigration = enjeu politique depuis les années 1980 (SOS Racisme, 1984) et la montée du Front national ; essor des actes racistes et de l’islamophobie depuis les années 2000 + débat croissant dans la société sur l’intégration des populations immigrées (émeutes dans les ghettos de banlieues en 2009) qui progresse pourtant (mariages mixtes)
4Étude 4 : la place des femmes dans la société française au XXe siècle
A) L’émancipation juridique
femmes mineures au début du XXe, sous la tutelle de leur père puis de leur mari (Code Civil de 1804), au nom d’une vision traditionnelle de la société (femme fragile, mère et au foyer) ; éducation des femmes à la traîne
émancipation juridique lente et progressive
école :
lois Ferry (1881-1882) ouvrent l’école primaire aux filles
1882 : création des lycées de jeunes filles, qui les préparent au baccalauréat à partir de 1924
1975 : loi Haby sur la mixité scolaire obligatoire
famille :
1938 : les femmes mariées obtiennent la capacité juridique et l’abolition du devoir d’obéissance
1965 : les femmes peuvent librement travailler, ouvrir un compte en banque, signer des chèques
1970 : disparition de la notion de chef de famille, remplacée par l’autorité parentale partagée
1975 : divorce par consentement mutuel
B) L’émancipation sociale
essor du travail féminin au XXe siècle, mais jusqu’à la fin des années 1960, leur rôle cantonné aux travaux domestiques et à la maternité par les mentalités et les politiques natalistes
1920 : pénalisation de l’avortement et de la contraception
1926 : fête des mères, réhabilitée sous Vichy
1932 : allocations familiales
1939 : code de la famille
après- guerre : baby-boom et progrès des arts ménagers (ex. : « Moulinex libère la femme »)
action des mouvements féministes (MLF, 1970) et rôle de la libération sexuelle : émancipation physique des femmes
1967 : loi Neuwirth légalisant la contraception (appliquée à partir de 1972)
1974 : création du secrétariat d’État à la condition féminine
1975 : loi Veil autorisant l’interruption volontaire de grossesse (IVG)
1980 : viol considéré comme un crime par la loi
1981 : ministère des Droits de la femme
hausse du niveau d’études et émancipation professionnelle
1972 : loi imposant l’égalité salariale hommes/femmes
1983 : loi sur l’égalité professionnelle hommes/femmes
1992 : loi réprimant le harcèlement sexuel au travail
2008 : loi sur la parité hommes/femmes dans les grandes entreprises
cependant, les inégalités salariales hommes/femmes restent importantes (écart de 18 %), les femmes restent encore plus touchées par le chômage, la précarité et les violences conjugales, et assurent encore près de 70 % des tâches domestiques