1La République et la question ouvrière : le Front Populaire
A) Un monde ouvrier marginalisé avant le Front Populaire
IIIe République s’est installée
en s’enracinant dans les campagnes
en s’appuyant sur les classes moyennes
crainte du modèle révolutionnaire illustré par la Commune (1871) puis la révolution bolchévique en Russie (1917) : répression des manifestations ouvrières (Fourmies, 1891 ; grèves de 1906 réprimées par Clemenceau)
les ouvriers ne se reconnaissent pas dans une République « bourgeoise » ; organisation du monde ouvrier surtout autour du socialisme
syndicats autorisés en 1884, Internationale socialiste en 1889, Confédération Générale du Travail (anarchiste) en 1895, Charte d’Amiens en 1906
organisation des socialistes en parti politique : SFIO (Jaurès) en 1905, division au Congrès de Tours (1920) entre socialistes réformistes (SFIO, Léon Blum) et communistes révolutionnaires (PCF)
question ouvrière surgit fin XIXe : débat entre les radicaux (partisans d’une action de l’État contre les inégalités) et les socialistes (partisans d’une République sociale : Jaurès)
amélioration lente de la condition ouvrière depuis la fin du XIXe siècle :
interdiction du travail des enfants (1874) et des femmes la nuit (1892)
repos hebdomadaire (1907)
retraites ouvrières (1910)
journée de 8 heures (1919 : revendication principales des grèves d’avant-guerre)
assurances sociales (1928) et allocations familiales (1932)
situation qui s’aggrave depuis la crise de 1929
montée du chômage
impuissance des gouvernements à résoudre la crise
montée des ligues d’extrême-droite menaçant la République (émeutes du 6 février 1934, auxquelles participent des anciens combattants et des communistes)
partis et syndicats de gauche forment un Front Populaire (programme de gouvernement commun) et gagnent les législatives de mai 1936
B) La mutation du monde ouvrier sous le Front Populaire
mai-juin 1936, grande vague de grèves avec occupations d’usines pour fêter la victoire du Front Populaire et le soutenir ; accords Matignon (juin 1936)
droit et liberté syndicale dans toutes les entreprises
délégués ouvriers
augmentation des salaires de 7 à 15 %
juin 1936-juin 1937 : gouvernement Blum (SFIO + radicaux) avec soutien du PCF (Maurice Thorez), lois sociales
40 heures de travail hebdomadaire
conventions collectives
2 semaines de congés payés
renforcement de l’intégration des ouvriers dans la République et de l’adhésion à ses valeurs, malgré l’échec du Front Populaire
affirmation de l’identité d’une classe ouvrière dominée par les ouvriers de la grande industrie tayloriste
essor de la syndicalisation : la CGT devient un parti de masse (4 millions d’adhérents) et un acteur essentiel du dialogue social
essor parallèle du PCF comme parti de la classe ouvrière
2La République, les religions et la laïcité depuis les années 1880
A) La laïcisation de la République (1880-1914)
laïcisation de l’État au cœur du programme des républicains, en opposition à l’Église catholique restée monarchiste
sécularisation de la vie quotidienne : fin de l’obligation du repos dominical (1880) et des prières au Parlement (1884)
rétablissement du divorce (1889)
lois sur la laïcité de l’instruction primaire (1882) et la laïcisation du personnel enseignant des écoles publiques (1886)
ralliement d’une majorité de catholiques à la République après l’appel du pape en 1892, mais montée de l’anticléricalisme à cause de l’appui de l’Église aux antidreyfusards et aux antirépublicains ; laïcité de combat du gouvernement Combes (1902-1904) : les congrégations religieuses sont interdites d’enseignement (1904) : rupture avec le Vatican
loi de séparation des Églises et de l’État en 1905 ; loi acceptée par les protestants et les juifs, refusée par les catholiques (condamnation par le pape en 1906 : crise des inventaires)
B) Ralliement des catholiques à la République (1914-1945)
rapprochement dans les tranchées pendant la Première Guerre mondiale ; loi de 1905 acceptée par le pape en 1924 : laïcité cesse d’être au centre des débats politiques
permanence de tensions entre République et catholiques, chez qui recrutent les ligues d’extrême-droite dans les années 1930
société française se sécularise progressivement : l’Église catholique perd de son influence, même si elle s’implique dans la société (1929 : création des Jeunesses Agricole Chrétienne (JAC), Ouvrière Chrétienne (JOC), Étudiante Chrétienne (JEC))
les chrétiens jouent un rôle dans la Résistance (même si Vichy s’appuie sur les valeurs catholiques et une partie du clergé se tait ou soutient le régime) : sauvetage de juifs, réseaux (Témoignage chrétien), parti politique (MRP, 1944)
C) Sécularisation de la société et nouveau débat sur la laïcité depuis 1945
principe de laïcité de l’État inscrit dans les Constitutions de la IVe République (1946) et de la Ve (1958) : valeur de la République
profonde sécularisation de la société, marquée par :
le fort recul du catholicisme (début XXIe siècle : 30 % des enfants sont baptisés, pratique religieuse < 10 %)
l’apparition de nouvelles croyances (sectes) et de nouvelles religions (bouddhisme)
l’affirmation de l’islam comme 2e religion de France
majorité des musulmans de France se réclament de la laïcité mais l’existence d’un islamisme radical minoritaire inquiète
l’État tente d’organiser un islam de France (création du Conseil français du culte musulman, 2003)
retour périodique de la guerre scolaire entre les partisans de la laïcité et ceux de l’enseignement privé, à propos de :
loi Debré (1959) sur le financement par l’État de l’enseignement catholique sous contrat
projet Savary (1984) d’unification de l’enseignement, retiré après une mobilisation massive des catholiques
laïcité remise en cause, depuis la fin des années 1980, au nom de la liberté individuelle, de l’affirmation identitaire par des valeurs religieuses et de débats sociétaux
affaires du foulard à l’école (1989) : loi de 2004 encadrant le port de signes et tenues manifestant ostensiblement une appartenance religieuse dans l’école publique
2012-2014 : manifestations du collectif La Manif pour la défense de la « famille traditionnelle » contre le mariage homosexuel, l’homoparentalité et l’enseignement d’une supposée « théorie du genre »
depuis le début du XXIe siècle, retour du débat entre partisans d’une laïcité ouverte et partisans d’une laïcité de combat et focalisation autour de la place de l’islam dans la société française
3La place des femmes dans la vie politique et sociale de la France au XXe siècle
A) L’émancipation juridique
femmes mineures au début du XXe, sous la tutelle de leur père puis de leur mari (Code Civil de 1804), au nom d’une vision traditionnelle de la société (femme fragile, mère et au foyer) ; éducation des femmes à la traîne
émancipation juridique lente et progressive
école :
lois Ferry (1881-1882) ouvrent l’école primaire aux filles
1882 : création des lycées de jeunes filles, qui les préparent au baccalauréat à partir de 1924
1975 : loi Haby sur la mixité scolaire obligatoire
famille :
1938 : les femmes mariées obtiennent la capacité juridique et l’abolition du devoir d’obéissance
1965 : les femmes peuvent librement travailler, ouvrir un compte en banque, signer des chèques
1970 : disparition de la notion de chef de famille, remplacée par l’autorité parentale partagée
1975 : divorce par consentement mutuel
B) L’émancipation sociale
essor du travail féminin au XXe siècle, mais jusqu’à la fin des années 1960, leur rôle cantonné aux travaux domestiques et à la maternité par les mentalités et les politiques natalistes
1920 : pénalisation de l’avortement et de la contraception
1926 : fête des mères, réhabilitée sous Vichy
1932 : allocations familiales
1939 : code de la famille
après- guerre : baby-boom et progrès des arts ménagers (ex. : « Moulinex libère la femme »)
action des mouvements féministes (MLF, 1970) et rôle de la libération sexuelle : émancipation physique des femmes
1967 : loi Neuwirth légalisant la contraception (appliquée à partir de 1972)
1974 : création du secrétariat d’État à la condition féminine
1975 : loi Veil autorisant l’interruption volontaire de grossesse (IVG)
1980 : viol considéré comme un crime par la loi
1981 : ministère des Droits de la femme
hausse du niveau d’études et émancipation professionnelle
1972 : loi imposant l’égalité salariale hommes/femmes
1983 : loi sur l’égalité professionnelle hommes/femmes
1992 : loi réprimant le harcèlement sexuel au travail
2008 : loi sur la parité hommes/femmes dans les grandes entreprises
cependant, les inégalités salariales hommes/femmes restent importantes (écart de 18 %), les femmes restent encore plus touchées par le chômage, la précarité et les violences conjugales, et assurent encore près de 70 % des tâches domestiques
C) La lutte pour les droits politiques
nombreux mouvements de femmes (« suffragettes ») pour le droit de vote des femmes de la fin du XIXe siècle aux années 1930 (Louise Weiss)
droit de vote en 1944 car engagement des femmes dans la Résistance
femmes rarement élues (5 % au Parlement en 1981) mais aussi peu nommées (rupture avec Giscard d’Estaing qui nomme deux femmes ministres : Simone Veil et Françoise Giroud)
femmes plus nombreuses en politique à partir des années 1980 (Édith Cresson Premier ministre en 1991-1992, plus de femmes maires) mais légitimité est souvent contestée
2000 : loi Guigou sur la parité en politique (les partis doivent présenter un nombre égal d’hommes et de femmes aux élections) qui n’a pas permis d’atteindre la parité : moins de 20 % de femmes à l’Assemblée nationaleet au Sénat
parité absolue aux élections départementales 2015 : constitution de binômes femme-homme => élection de 50 % de conseillères et de 50 % de conseillers départementaux, mais seulement 8 femmes ont été élues présidentes d’assemblées départementales (sur 98 départements où l’on votait)