Plusieurs genres narratifs peuvent « tomber » le jour de l’épreuve du bac : il est important que tu sois capable de les identifier !
ALes différents genres narratifs
Caractéristique
Le roman
Forme longue ;
intrigue riche et complexe ;
personnages : vies intérieures et passions dévoilées ;
grande diversité d’œuvres : roman historique, policier, picaresque, etc.
Exemple
XVIIe : La Princesse de Clèves de Mme de La Fayette, 1678
XVIIIe : Les Liaisons dangereuses de Laclos, 1782
XIXe : Bel-Ami de Maupassant, 1885
XXe : Belle du Seigneur d’Albert Cohen, 1968
XXIe : Pars vite et reviens tard de Fred Vargas, 2001
Caractéristique
La nouvelle
Forme courte ;
chute à la fin de l’histoire ;
action simple centrée autour de quelques personnages.
Exemple
XIXe : La Vénus d’Ille de Mérimée, 1837, « Un cœur simple » de Flaubert, 1877, Boule de Suif de Maupassant, 1880
XXe : Autres lieux et autres nouvelles de Daeninckx, 1998
Caractéristique
L’autobiographie
Récit rétrospectif que le narrateur-auteur fait de sa propre vie ;
auteur, narrateur et personnage principal = une même personne ;
l’auteur établit avec le lecteur un « pacte autobiographique » (Philippe Lejeune) : il s’engage moralement à raconter sa vie de façon sincère et authentique ;
distingue 2 je : le je-personnage et le je-narrateur, le second pouvant par exemple commenter a posteriori avec ironie ou nostalgie les événements qu’il raconte ;
le narrateur peut intervenir au présent d’énonciation (temps de l’écriture), rompant avec le passé du récit, ou proposer une prolepse (raconter à l’avance un événement qui se passera plus tard) ;
Rousseau = le fondateur du genre (Les Confessions, XVIIIe siècle).
Caractéristique
Roman autobiographique ou autofiction
L’écrivain s’inspire de sa vie pour écrire une fiction ;
part de vérités autobiographiques plus ou moins grande ;
Exemple
XXe : À la recherche du temps perdu de Proust, 1913, proche de l’autobiographie, LeBlé en herbe de Colette, 1954, roman fictif
Caractéristique
Les mémoires
Témoignage d’une personne ayant joué un rôle important dans l’Histoire,
permet de raconter aussi l’Histoire,
rapporte des anecdotes qui éclairent les coulisses de la scène politique,
propose une autre lecture des événements que celle des historiens.
Exemple
XIXe : Mémoires d’outre-tombe de Chateaubriand (l’auteur revient sur la prise de la Bastille), 1849
XXe : Mémoires de guerre de Charles de Gaulle (le Général revient sur la Seconde Guerre mondiale), 1954
Caractéristique
Le journal
Raconter sa vie jour après jour (enfant/adolescent).
XXe : Le journal d’Anne Frank, 1947
On trouve aussi des journaux d’écrivains, souvent très précieux pour comprendre la genèse d’une œuvre.
XXe : Journal de Gide
BLes paroles rapportées
Remarque
Dans un récit, tu remarqueras que le narrateur peut rapporter les paroles des personnages. Sois attentif au choix de l'auteur : selon la manière dont le narrateur rapporte les paroles, l'effet sera différent sur le lecteur !
Réflexe d'analyse
Discours
De quelle manière le narrateur rapporte-t-il les paroles des personnages ? Au discours direct ? indirect ? indirect libre ?
Définition
Discours direct
Les paroles sont rapportées fidèlement.
Effet recherché : oralité, impression d’assister à la scène ;
mise en forme : présence d’une ponctuation signalant les prises de parole : guillemets, tirets.
Exemple
« Allez-vous-en tous ! Allez rejoindre vos régiments ! Et vivement ! qu’il gueulait. - Où qu’il est le régiment, mon commandant ? qu’on demandait nous… - Il est à Barbagny. - Où que c’est Barbagny ? - C’est par là ! » Voyage au bout de la nuit, Louis-Ferdinand Céline, 1932
Définition
Discours indirect
Les paroles ne sont pas modifiées mais sont reformulées pour qu’elles s’intègrent directement dans le récit.
Effet recherché : pas de rupture avec le récit ;
mise en forme : la ponctuation expressive (!, ?) et les mots marqueurs d’oralité (Oh ! bof) sont supprimés ou transcrits, par exemple par un verbe introducteur qui donne une indication de ton (ex. : s’exclamer, hurler, murmurer) ;
procédés : pronoms de 1re et 2e personne remplacés par pronoms de 3e personne ; les temps des verbes sont adaptés au temps du récit.
Exemple
« Mme de Clèves acheva de danser et, pendant qu’elle cherchait des yeux quelqu’un qu’elle avait dessein de prendre, le roi lui cria de prendre celui qui arrivait. » La Princesse de Clèves, Madame de La Fayette, 1678
Définition
Discours indirect libre
Les paroles sont modifiées mais l’expressivité est conservée. Les paroles sont adaptées pour s’intégrer directement dans le récit. Il est parfois difficile de distinguer qui parle entre le narrateur et le personnage.
Effet recherché : impression d'accéder directement aux pensées d'un personnage ;
mise en forme : ponctuation expressive (?, !), mots marqueurs d'oralité conservés ;
procédés : utilisation de la 3e personne, modification des temps si le récit est au passé.
Exemple
Un exemple de glissement du discours indirect au discours indirect libre : « Il me dit qu’il s’intéressait à la politique, depuis la Libération, oui, surtout depuis qu’il avait fait partie d’un comité d’usine dans le Piémont. C’était la plus belle période de sa vie. ». Le Marin de Gibraltar, Marguerite Duras, 1952
Définition
Discours narrativisé ou récit de paroles
Le narrateur ne reprend pas les paroles, mais en résume le thème général, il en paraphrase le contenu de manière lointaine. C’est un moyen aussi de ne pas répéter des propos déjà tenus.
Exemple
« Il recommença à parler de lui. » Le Marin de Gibraltar, Marguerite Duras, 1952
CStatut et point de vue du narrateur
Réflexe d'analyse
Qui raconte ? Qui voit ?
Les questions essentielles que tu dois te poser pour partir dans la bonne direction :
Qui parle? L’écrivain lui-même (dans une autobiographie), un narrateur personnage de l’histoire (le lecteur devient confident, ce qui crée une impression de proximité), un narrateur extérieur ?
Que sait le narrateur ? Focalisation interne, externe (le lecteur doit décoder des indices implicites), zéro (illusion que le lecteur connaît tout de l’histoire) ?
Quel effet cela produit-il ?
Définition
Statut du narrateur
Le narrateur peut être un personnage de l’histoire (narrateur intradiégétique) ou être extérieur à l’histoire (narrateur extradiégétique).
Remarque
Si le récit est mené à la 1re personne, le narrateur est un personnage de l’histoire. Si le récit est mené à la 3e personne, le narrateur peut être indifféremment un personnage de l’histoire ou être extérieur à celle-ci.
Définition
Point de vue ou focalisation
Le narrateur adopte un angle de vue pour mener le récit (raconter une scène, faire le portrait d’un personnage). Demande-toi à quelles informations tu as accès grâce à ce que partage le narrateur !
Caractéristique
Focalisation interne : que sait le narrateur ?
Le narrateur en sait autant qu'un personnage ;
il adopte le point de vue d’un personnage (verbes de pensées, de sentiment etc.) ;
on ne sait rien de plus que lui.
Exemple
« 21 mars 1927. Minuit et demi. Tchen tenterait-il de lever la moustiquaire ? Frapperait-il au travers ? L'angoisse lui tordait l'estomac [...]. » Incipit de La Condition humaine, André Malraux, 1933
Caractéristique
Focalisation externe : que sait le narrateur ?
Le narrateur en sait moins que les personnages ;
la scène est décrite comme si elle était vue par un témoin extérieur ;
on entend ce que les personnages disent, on voit ce qu'ils font, mais on ne sait rien de ce qu'ils pensent.
Exemple
« L’homme eut un sourire cauteleux qui découvrit ses longues dents jaunes, fouilla dans sa musette et, prenant une grande boîte en fer blanc, la rapprocha de sa figure. "Poison", chuchota-t-il, guignant par-dessus la boîte. Il prononçait "Pouézon" au lieu de poison, et chargeait le mot de douceur et de mystère. » « Le chien de Claude » de Roald Dahl, tiré de Bizarre ! Bizarre ! 1953
Caractéristique
Focalisation 0 : que sait le narrateur ?
Le narrateur, souvent appelé narrateur omniscient, en sait plus que les personnages ;
par focalisation zéro, on signifie qu’on ne peut savoir d’où le narrateur tire son information.
Exemple
« Vers le mois d'octobre 1829, monsieur Simon Babylas Latournelle, un notaire, montait du Havre à Ingouville, bras dessus bras dessous avec son fils, et accompagné de sa femme, près de laquelle allait, comme un page, le premier clerc de l'Étude, un petit bossu nommé Jean Butscha. » incipit de Modeste Mignon, Balzac, 1844
Remarque
Il est très rare qu'un récit soit entièrement rédigé selon le même point de vue. Ex. : lors d’une rencontre amoureuse, on peut avoir successivement le point de vue de deux personnages, comme le propose Stendhal dans Le Rouge et le noir, 1830
DRéflexes d’analyse face à un texte narratif
Remarque
Si tu choisis le commentaire de texte, tu devras analyser en temps limité un texte que tu ne connais pas. Pour savoir dans quelle direction aller et être efficace, il faut que tu te poses une série de questions qui vont guider ton travail d’analyse. Essaye de retenir tous les points importants à interroger : cela te donnera un cadre pour l’analyse et des réflexes rassurants !
Réflexe d'analyse
Contexte et type de récit
En parcourant le texte, demande-toi à quel mouvement littéraire se rattache l’extrait (ex. : réaliste, romantique) Tu dois également définir le type de récit auquel correspond ton extrait (récit autobiographique, policier, nouvelle, etc.). Ces premiers indices t’invitent à une démarche déductive (du général au particulier) : à partir de ce que tu sais du mouvement/du genre, tu cherches dans le texte ce qui peut l’illustrer. Tu mets tes « radars » en route : par quoi se caractérise le mouvement en question (thèmes, règles ou revendications, etc.) ? quelles sont les spécificités du genre concerné ? son évolution ?, etc.
Exemple
Un texte de Zola tombe le jour de l’épreuve. Si tu sais que Zola fait partie du mouvement naturaliste et que tu en connais les grandes lignes, tu orienteras rapidement ton attention sur les caractéristiques du naturalisme : les descriptions très précises et le lexique spécifique par exemple.
Réflexe d'analyse
Situation du passage dans l’œuvre
As-tu des indices pour savoir où se situe le passage à analyser au sein de l’œuvre ? Au début de l’œuvre ? À la fin ? Est-ce un passage clé ?
Remarque
N’oublie pas d’exploiter le chapeau introducteur pour tirer parti de toutes les informations.
Définition
Incipit
Correspond au début d’un récit. Le lecteur reçoit les informations (personnages, lieu, époque, intrigue), ou pas ! L’incipit a généralement pour fonction d’accrocher le lecteur.
Est-ce un incipit in medias res (le lecteur est d’emblée placé au milieu de l’action et invité à comprendre peu à peu l’univers dans lequel il entre) ?
Le narrateur fournit-il toutes les indications en guidant le lecteur ?
Définition
Excipit
Correspond à la fin d’une œuvre.
S’agit-il d’un dénouement heureux ? malheureux ?
Y a-t-il une visée morale ou philosophique ?
Est-ce que l’auteur conclut son récit ? Comment le conclut-il ?
Y a-t-il un écho avec l’incipit ? (dans le cas où tu le connais)
Réflexe d'analyse
Reconnaître un topos
Certains thèmes ou certaines situations sont attendus dans les romans : scène de confrontation ou d’élucidation dans un roman policier, scène de rencontre, d’aveu ou de séparation, etc. Les problématiques de ce genre de passages sont souvent liées au renouvellement d’un topos ainsi qu’au jeu avec les conventions et les attentes du lecteur. Ex. : en quoi cette rencontre est-elle originale ? ou racontée de manière originale ?
Définition
Topos
Représente un lieu commun dans la littérature, un thème récurrent.
Est-ce que l’extrait est représentatif d’un sujet que l’on retrouve souvent dans les romans : une rencontre amoureuse ? une rupture ? une scène d’aveu ?
Ex. : la rencontre entre Ariane et Solal dans Belle du Seigneur d’Albert Cohen, 1968.
Réflexe d'analyse
Cohérence et structure du passage
La délimitation d’un extrait romanesque est toujours le résultat d’un choix : efforce-toi de comprendre ce qui rend ce choix pertinent. Même si tu ne connais pas l’œuvre dont est tiré le passage à commenter, demande-toi :
ce qui donne son unité au passage : un thème, une scène ;
comment il s’organise (ex. : un premier temps descriptif, puis un dialogue).
Réflexe d'analyse
La structure de l’extrait
Temps et valeur des verbes : étudier les temps des verbes et leurs valeurs te permet de distinguer narration (passé simple ou présent de narration) et description (imparfait), de repérer une succession rapide d’actions (nombreux verbes).
Sois attentif à la chronologie des événements racontés : repères-tu une analepse (retour en arrière), une prolepse (évocation ou narration de faits qui ne se sont pas encore déroulés) ?
Réflexe d'analyse
Le rythme du récit
Quel est le rapport entre la durée de l’histoire (heures, jours, années) et le temps de la narration (nombre de pages) ? Ce rapport détermine le rythme du récit ;
proposer un sommaire qui résume certains faits ;
ralentir le récit : la pause descriptive ou explicative interrompt le cours du récit pour décrire ou donner une explication ;
faire une scène : donner à voir l’intégralité du moment raconté, notamment par la retranscription des paroles (dialogues) ;
accélérer le récit : une ellipse passe sous silence une partie de l’histoire (ex. : la semaine suivante) ;
Réflexe d'analyse
Description
Tu dois :
reconnaître l’organisation de la description (éléments décrits, ordre suivi pour les présenter) ;
définir le point de vue adopté (la logique de la description, les marques de modalisation peuvent t’y aider) ;
reconnaître les fonctions de la description (ornementale, effet de réel, documentaire, explicative, etc.).
Réflexe d'analyse
Identifier les registres
Pars de ta réaction première face au texte pour définir la tonalité du texte (émouvant, drôle, anxiogène).
Tu pourras alors chercher dans le texte les procédés mis en œuvre pour produire cet effet sur le lecteur.
Exemple
Un récit policier mené selon le point de vue omniscient peut créer un climat angoissant, quand le lecteur en sait davantage qu’un personnage menacé.
Réflexe d'analyse
Personnages
Tu dois porter une attention particulière aux personnages présents dans l’extrait. Comment l’auteur fait-il vivre les personnages ? A-t-on une présentation générale qui nous indique leur statut social, nous renseigne sur leur passé (ex. : dans une analepse : équivalent romanesque du flash-back cinématographique) ou une vision fragmentée ? A-t-on accès à leurs pensées et leurs émotions ? Si oui, comment ? N’oublie pas d’étudier dans ce cadre précis les paroles rapportées, le monologue intérieur, le statut du narrateur et le point de vue adopté pour mener le récit.
Réflexe d'analyse
Reconnaître et analyser un portrait
De quels éléments disposons-nous sur le personnage ? d’éléments concernant son aspect physique, son caractère, son comportement ? Connaissons-nous son passé ?
Est-ce un héros (valeureux guerrier) ? un anti-héros (un lâche, un homme ordinaire) ?
Quelle est la fonction du portrait ? Est-il plutôt réaliste (aide le lecteur à se représenter un personnage en l’ancrant dans le réel), plutôt symbolique (un portrait physique qui dévoile une personnalité) ? Le portrait a-t-il une fonction narrative (annonce la suite du récit), explicative (fait mieux comprendre le personnage), esthétique (orne le récit, comme un portrait en peinture peut être un élément de décoration) ?
Quel est le point de vue adopté pour ce portrait ? Par exemple, le portrait de l’héroïne par celui qui l’aime sera fortement modalisé (ex. : le chevalier Des Grieux évoquant Manon), comme celui d’une mère par son enfant (Le Livre de ma mère d’Albert Cohen, 1954 ou Sido, Colette, 1930).