On entend par échange un mouvement : celui qui consiste à donner A et à recevoir B en retour. La première caractéristique de l’échange est donc la réciprocité.
L’échange prend plusieurs formes : d’abord le troc, puis l’échange d’une somme d’argent contre un objet, ou encore le don, qui bien qu’a priori désintéressé, nous permet d’échanger autre chose que des réalités matérielles.
B) Nous ne nous suffisons pas à nous-mêmes
Nous échangeons car nous ne disposons pas de tout ce dont nous avons besoin ou envie : c’est parce que nous ne nous auto-suffisons pas, que nous ne sommes pas en autarcie. Contrairement à la plupart des animaux, qui se suffisent à eux-mêmes, les hommes ont besoin de l’aide d’autrui. L’absence d’autonomie appelle donc le concours de nos semblables.
AdamSmith le synthétise ainsi : « Donnez-moi ce dont j'ai besoin, et vous aurez de moi ce dont vous avez besoin vous-même ; et la plus grande partie de ces bons offices qui nous sont si nécessaires, s'obtient de cette façon. »
C) Nous échangeons pour subvenir à nos propres besoins matériels et immatériels
Il faut distinguer l’échange d’un bien matériel contre un autre, de l’échange d’un bien immatériel contre un bien matériel, et vice versa.
Dans le cadre des rapports de production, un ouvrier échange sa force de travail contre un salaire. Il n’apporte à proprement parler pas de bien matériel, mais il participe à la production de biens matériels par son travail.
2La structure de l’échange
A) La recherche de la compensation
On cherche dans l’échange à compenser ce que nous considérons être un manque. On peut représenter la structure d’un échange ainsi :
je t’échange ceci car je n’en ai pas le besoin, contre cela car je pense en avoir besoin. Ce qui t’es avantageux, car ce que je te propose, tu en as le besoin.
Aristote met en avant la structure fondamentale qui relie l’échange au besoin à travers l’idée de justice et deproportion dans l’Éthique à Nicomaque : « On peut figurer la réciprocité proportionnelle par la combinaison ou le rapprochement des termes, dans le sens de la diagonale : soit A l’architecte, B le cordonnier, C la maison, et D la chaussure. Sans doute faut-il que l’architecte reçoive du cordonnier l’espèce de travail que celui-ci est capable de produire, et que, de son côté, il le fasse profiter du produit de son propre travail. »
B) La recherche de la concorde
On recherche également dans les échanges entre individus, comme entre États, une alternative à la violence que constituent le crime ou le pillage. L’échange est ainsi la forme rationnelle de l’articulation entre les différents besoins.
C’est ainsi que certains, comme Montesquieu, ont pu soutenir que nous pouvons par les échanges commerciaux, atteindre la paix : «L’effet naturel du commerce est de porter à la paix. Deux nations qui négocient ensemble se rendent réciproquement dépendantes : si l’une a intérêt d’acheter, l’autre a intérêt de vendre ; et toutes les unions sont fondées sur les besoins mutuels. […] »
Mais cette idée selon laquelle le commerce adoucirait les mœurs appelle une clarification quant aux valeurs qui doivent animer les échanges.
3Échange et valeurs
A) Valeur d’échange de la valeur d’usage
Il faut distinguer dans tout échange la valeur d’usage de la valeur d’échange. Si la première se fonde sur un accord, la seconde a trait à la valeur que l’agent y projette : « Par exemple, l'usage propre d'un soulier est de chausser ; on peut aussi le vendre ou l'échanger pour se procurer de l'argent ou du pain, ou quelque autre chose, et cela sans qu'il change de nature ; mais tel n'est pas là son usage propre, n'ayant pas été inventé pour le commerce. » Aristote, La Politique.
B) Qu’est-ce qu’une marchandise ?
Ceci nous pousse à bien distinguer ce qui, dans l’échange, peut être considéré comme une marchandise. Il faut alors distinguer ce qui est un bien matériel (matière première, produit manufacturé, produit industriel), de ce qui relève de biens immatériels (un concert, un spectacle, etc.).
Ce point pose des problèmes éthiques : certaines réalités comme le corps humain ne peuvent pas faire l’objet d’un commerce d’un point de vue éthique, bien que cette définition puisse économiquement l’inclure.
Cette réciprocité dans la recherche de l’estime de soi par la reconnaissance de l’autre en tant que valeur égale à la mienne fonctionne aussi dans l’échange marchand. En effet, l'échange marchand suppose la confiance, qui engage la responsabilité de chacun de tenir sa promesse. Celui-ci doit être jugé comme digne de confiance (Ex. : un contrat d’affaire, de travail et même dans un contrat portant sur des marchandises qui ne doivent pas décevoir quant à leur valeur d’usage.