Hérodote : premières lignes de L’Enquête (Historia)
« Hérodote d'Halicarnasse présente ici les résultats de son Enquêteafin que le temps n'abolisse pas le souvenir des actions des hommes et que les grands exploits accomplis soit par les Grecs, soit par les Barbares, ne tombent pas dans l'oubli ; il donne aussi la raison du conflit qui mit ces deux peuples aux prises. »
L’Enquête, vers 445 av. J.-C.
Rousseau : la valeur éducative de l’histoire
Rousseau présente ici l’enseignement de l’histoire sous un jour critique : il faudra attendre qu’Émile ait 18 ans pour qu’il apprenne l’histoire avec fruit.
« Pour mettre le cœur humain à sa portée sans risquer de gâter le sien, je voudrais lui montrer les hommes au loin, les lui montrer dans d’autres temps ou dans d’autres lieux, et de sorte qu’il pût voir la scène sans jamais y pouvoir agir. Voilà le moment de l’histoire ; c’est par elle qu’il lira dans les cœurs sans les leçons de la philosophie ; c’est par elle qu’il les verra, simple spectateur, sans intérêt et sans passion, comme leur juge, non comme leur complice ni comme leur accusateur. [...] Émile ne se reconnaîtra guère dans les étranges objets qui frapperont ses regards durant ses nouvelles études ; mais il saura d’avance écarter l’illusion des passions avant qu’elles naissent ; et, voyant que de tous les temps elles ont aveuglé les hommes, il sera prévenu de la manière dont elles pourront l’aveugler à son tour, si jamais il s’y livre. »
Émile ou De l’Éducation, 1762
Hegel
« Les grands hommes de l’histoire sont ceux dont les fins particulières renferment le facteur substantiel qui est la volonté du génie universel. On doit les nommer des héros en tant qu’ils ont puisé leurs fins et leur vocation non seulement dans le cours des événements, tranquille, ordonné [...] mais à une source dont le contenu est caché, et n’est pas encore parvenu à l’existence actuelle, dans l’esprit intérieur, encore souterrain [...] - ils semblent donc puiser en eux-mêmes et leurs actions ont produit une situation et des conditions mondiales qui paraissent être uniquement leur affaire et leur œuvre. De tels individus n’avaient pas, en ce qui concerne leur fin, conscience en général de l’Idée ; mais ils étaient des hommes pratiques et politiques. C’étaient aussi des gens qui pensaient et qui savaient ce qui est nécessaire, et ce dont le moment est venu. »
Leçons sur la philosophie de l’histoire, 1837
Nietzsche : la vertu de l’oubli
« L’homme qui est incapable de s’asseoir au seuil de l’instant en oubliant tous les événements du passé [...] ne saura jamais ce qu’est un bonheur et, ce qui est pire, il ne fera jamais rien pour donner du bonheur aux autres [...]. Toute action exige l’oubli, comme la vie des êtres organiques exige non seulement la lumière mais aussi l’obscurité. Un homme qui ne voudrait sentir les choses qu’historiquement serait pareil à celui qu’on forcerait à s’abstenir de sommeil ou à l’animal qui ne devrait vivre que de ruminer et de ruminer sans fin. Donc, il est possible de vivre presque sans souvenir et de vivre heureux, comme le démontre l’animal, mais il est encore impossible de vivre sans oubli. Ou plus simplement encore, il y a un degré d’insomnie, de rumination, de sens, historique qui nuit au vivant et qui finit par le détruire, qu’il s’agisse d’un homme, d’une peuple ou d’une civilisation. »
Considération inactuelle 2, 1874
Marx : l’histoire et la lutte des classes
« L'histoire de toute société jusqu'à nos jours n'a été que l'histoire de luttes de classes. Homme libre et esclave, patricien et plébéien, baron et serf, maître de jurande et compagnon, en un mot oppresseurs et opprimés, en opposition constante, ont mené une guerre ininterrompue, tantôt ouverte, tantôt dissimulée, une guerre qui finissait toujours soit par une transformation révolutionnaire de la société tout entière, soit par la destruction des deux classes en lutte. »