Platon : l’expérience n’est que l’occasion de se ressouvenir des Idées
Après ce passage, Socrate prouvera ses dires en demandant à un esclave inculte de résoudre un problème de géométrie. L'esclave réussira alors que Socrate n’a fait que l’aiguiller en lui posant les bonnes questions. Ainsi, le savoir s’apparente davantage à un retour sur soi pour saisir la vérité des idées, qu’à l’apprentissage simple d’une nouvelle connaissance inconnue.<
« L’âme, immortelle et plusieurs fois renaissante, ayant contemplé toutes choses, et sur la terre et dans l’Hadès, ne peut manquer d’avoir tout appris. Il n’est donc pas surprenant qu’elle ait, sur la vertu et sur le reste, des souvenirs de ce qu’elle en a su précédemment. La nature entière étant homogène et l’âme ayant tout appris, rien n’empêche qu’un seul ressouvenir (c’est ce que les hommes appellent savoir) lui fasse retrouver tous les autres, si l’on est courageux et tenace dans la recherche ; car la recherche et le savoir ne sont au total que réminiscence. »
Ménon, VIe siècle av. J.-C.
Hume : le savoir est une perception empirique
« Ce qu’on n’a jamais vu, ce dont on n’a jamais entendu parler, on peut pourtant le concevoir ; et il n’y a rien au-dessus du pouvoir de la pensée, sauf ce qui implique une absolue contradiction. Mais, bien que notre pensée semble posséder cette liberté, nous trouverons, à l’examiner de plus près, qu’elle est réellement resserrée en de très étroites limites et que tout ce pouvoir créateur de l’esprit ne monte à rien de plus qu’à la faculté de composer, de transposer, d’accroître ou de diminuer les matériaux que nous apportent les sens et l’expérience. Quand nous pensons à une montagne d’or, nous joignons seulement deux idées compatibles, or et montagne, que nous connaissions auparavant. Nous pouvons concevoir un cheval vertueux ; car le sentiment que nous avons de nous-mêmes nous permet de concevoir la vertu ; et nous pouvons unir celle-ci à la figure et à la forme d’un cheval, animal qui nous est familier. Bref, tous les matériaux de la pensée sont tirés de nos sens, externes ou internes ; c’est seulement leur mélange et leur composition qui dépendent de l’esprit et de la volonté. »
Enquête sur l’entendement humain, 1748
Karl Popper : le savoir théorique scientifique doit être réfutable par l’expérience
« Peu importe le grand nombre de cygnes blancs que nous puissions avoir observé, il ne justifie pas la conclusion que tous les cygnes sont blancs. »
La Logique de la découverte scientifique, 1934
Kant : la théorie est l’unique moyen de tirer profit des expériences
« Ce n’était donc pas la faute de la théorie, si elle n’avait encore que peu de valeur pour la pratique, cela venait de ce qu’il n’y avait pas assez de théorie ; il manquait celle que notre homme aurait dû apprendre de l’expérience, et qui est la véritable théorie, quand même il ne serait pas en état de se la donner lui-même et de l’exposer systématiquement, en professeur, dans des propositions générales, et que par suite, il ne pourrait prétendre au titre de théoricien de la médecine, de l’agriculture, etc. – Personne ne peut donc se donner pour un praticien versé dans une science et mépriser la théorie, sans montrer simplement qu’il est ignorant dans sa partie, puisqu’il croit qu’on peut aller plus loin que la théorie le permet, en faisant par tâtonnements des essais et des expériences sans rassembler certains principes (qui constituent proprement ce qu’on appelle théorie), et sans s’être représenté son travail comme un tout (qui, si l’on procède alors méthodiquement, prend le nom de système). »
Sur l’expression courante : « Il se peut que ce soit vrai en théorie, mais dans la pratique cela ne vaut pas », 1793